"Saint Seiya in Love : Aphrodite"
Chapitre 1 : "Le guerrier au nom de déesse"
Aphrodite regarda vers le bas de la falaise. Albior et Milo se battaient, et le chevalier d'or n'arrivait pas à prendre le dessus. Albior était définitivement très puissant, le Pope faisait bien de se méfier de lui. Il avait même envoyé deux chevaliers d'or pour se débarrasser de lui. Aphrodite sortit une rose rouge, fixa son cosmos sur elle, la transformant en arme mortelle. Un bruit derrière lui le fit se retourner.
"Qui êtes vous ?" Le jeune chevalier le regardait avec de grands yeux surpris. Aphrodite eut un instant d'hésitation. Il ressemblait tellement à...
Le jeune garçon portait une armure bleue, où pendaient des chaînes. Il était un des disciples d'Albior sans doute, et était tombé sur lui par hasard.
Le chevalier d'or chassa le souvenir, et se déplaça à la vitesse de la lumière. Il porta un coup mortel et le chevalier de bronze s'écroula au milieu de ses chaînes, le coeur transpercé. Aphrodite regarda le sang qui maculait sa main. Il avait horreur d'être couvert de sang. Aphrodite s'agenouilla, vérifiant que le garçon était mort, ne pouvant détacher son regard de son visage. La ressemblance était si grande...
Le chevalier des Poissons se releva, puis reprit position derrière le piton rocheux. Il lança la rose qui blessa Albior au bras, puis regarda Milo achever le chevalier affaibli par le poison. Il disparut ensuite, son travail achevé, et retourna au Sanctuaire.
Mais les souvenirs affluaient en lui, ravivés par le visage de ce jeune garçon.
Aussi loin qu'il puisse se souvenir, Aphrodite avait toujours porté ce nom. C'était pourtant le nom d'une femme. Son maître et père adoptif l'avait ainsi nommé à cause de sa grande beauté. Quand il l'avait trouvé, Aphrodite avait déjà un an, mais ses grands yeux, sa peau délicate, firent croire au chevalier d'or des Poissons qu'il avait trouvé une fille. Ce ne fut qu'en le changeant de couches qu'il s'aperçut que c'était un mâle. Malgré tout, il ne changea pas le nom qu'il venait de lui donner.
Ce nom fut un calvaire pour le petit Aphrodite, au cours de son enfance. Les enfants du village se moquaient de lui et de son air efféminé, lui disant qu'il était "une fille avec un zizi". Ces moqueries, et l'impression que tous autour de lui le voyaient comme un être étrange, attisèrent sa rancoeur. Il se jura bien de devenir un jour un grand chevalier que personne ne pourrait vaincre, et il leur ferait ravaler leurs insultes.
Aphrodite grandit, et son maître l'entraîna durement
afin qu'il prenne un jour sa succession. Au fur et à mesure, Aphrodite
devenait plus beau, ses traits s'affinant, son corps se développant.
A l'âge de dix ans il parvint à vaincre son maître en
combat singulier. Celui-ci l'emmena alors au Sanctuaire, puis rendit son
armure au Pope afin qu'il la remette à Aphrodite. Le vieux maître
disparut ensuite et personne ne le revit jamais.
Aphrodite devint le nouveau chevalier des Poissons. A l'âge de douze ans, il était un superbe éphèbe, ses cheveux longs mettaient en avant la délicatesse de ses yeux. Son visage était bien celui d'une femme, et sa mince silhouette, sa musculature discrète, et la blancheur de sa peau faisaient que ceux qui ne connaissaient pas le prenaient pour une jeune fille, jusqu'à ce qu'il leur parle.
Sa voix masculine était tout ce qui faisait d'Aphrodite un homme. Son esprit avait accepte sa féminité, et il portait désormais son nom avec fierté. Il se savait beau, et comment ne pas être fier de porter le nom de la plus belle déesse ayant existé ?
Le jeune homme était imbu de lui-même. Il aimait le corps que la nature lui avait donné, aimait son visage, ses grands yeux, la courbe de ses lèvres. Lorsque vint l'âge de la puberté, son corps se transforma et il découvrit avec horreur les changements morphologiques qui apparaissaient chez l'homme. Ne supportant pas sa pilosité - bien que fort discrète - il commença à s'épiler régulièrement, afin de conserver lisse sa peau délicate.
Il en vint à apprécier le regard admiratif des autres. Les hommes le regardaient avec insistance avant de réaliser son sexe, et les femmes, qui détectaient plus vite ces choses-là, l'observaient avec jalousie, voire mépris. Au début, Aphrodite ne comprit pas cette rancoeur, mais tandis que ses sens s'éveillaient, il découvrit qu'il possédait un pouvoir de séduction que peu de femmes avaient. Sa nature égocentrique le poussa à se servir de ce pouvoir pour exciter la rancune des autres à son égard.
Il joua plusieurs fois ainsi à semer le trouble dans le coeur des hommes, brisant parfois des amitiés, parfois des amours déjà existantes. Il séduisait pour délaisser, se montrait désirable, attirant à lui un pauvre garçon, le forçant à rompre avec sa petite amie, puis lui avouant la vérité, le laissait alors terriblement seul. Ce petit jeu dura quelque temps, avant qu'Aphrodite soit lui-même piégé.
Il avait, comme à son habitude, séduit un garçon, cette fois plus âgé que lui d'une dizaine d'années. Il l'avait choisi pour son air sérieux, et la tendresse dont il faisait preuve avec sa jeune épouse. Aphrodite joua de ses charmes, et finit par provoquer des disputes au sein du couple qu'il espionnait alors de loin, se délectant du spectacle. Puis le couple se sépara, et Aphrodite voulut alors mettre en pratique la dernière phase de son plan et avouer sa vraie nature au jeune homme.
Mais celui-ci, loin d'en être choqué, accepta calmement la vérité, et lui fit alors sa déclaration. Aphrodite en fut troublé autant que vexé. Comment était-il possible de l'aimer alors que la nature les avait faits si semblables et si différents à la fois, alors qu'il s'était évertué à briser son couple. Aphrodite fut si surpris par cet accident dans son scénario qu'il accepta la proposition de l'homme. Ce fut la première expérience homosexuelle d'Aphrodite.
En rentrant chez lui, ce soir-là, Aphrodite se sentait très mal. La douleur était encore vive, et son corps n'était pas habitue à être ainsi forcé, mais surtout, il ne savait que penser de ses propres actes. Il s'était tout simplement comporté comme une femme, laissant à cet homme la liberté de faire ce qu'il voulait de son corps merveilleux. Aphrodite ne savait plus où il en était. Etait-il un homme ou une femme ?
Aphrodite revit le jeune homme pendant plusieurs semaines, malgré son trouble intérieur. Leurs relations durèrent tant qu'Aphrodite resta cantonné dans son rôle de femme au corps d'homme. Mais un jour, Aphrodite voulut expérimenter les sensations que ressentait son partenaire, et échanger les rôles. Le jeune homme refusa violemment, prétextant que dans un couple, il ne pouvait y avoir qu'un homme dominant. Ce dernier mot mit Aphrodite en colère, et la dispute éclata bientôt. Le jeune chevalier excédé, donna un violent coup au visage de son amant, qui tomba au sol. Aphrodite s'approcha, s'agenouillant près de lui. L'homme avait la nuque brisée et était déjà mort. Aphrodite s'enfuit et retourna au Sanctuaire, d'où il ne bougea plus pendant un an.
Aphrodite s'était depuis longtemps lié d'amitié avec Masque de Mort du Cancer. Il était l'un des rares chevaliers à se souvenir du nom réel du chevalier d'or de la quatrième maison. Ils étaient liés par leurs caractères, très semblables malgré les apparences, et par leur isolement, car ils se méfiaient des autres chevaliers d'or. Tous deux dénués de scrupules, ils obéissaient au Pope quels que soient les ordres.
Masque de Mort avait fait part de ses doutes au sujet de la bonté
du Pope et de sa légitimité, à Aphrodite, et ce dernier
était d'accord avec son ami. Le Pope était sans doute plus
mystérieux qu'il ne voulait le montrer, et il devait aussi cacher
un lourd secret. Mais cela le rendait plus puissant encore, et Masque de
Mort comme Aphrodite respectaient la force plus que la justice. Si le Pope
avait pu se hisser à cette position par sa seule force, alors il
était digne de l'occuper. Tel était leur point de vue.
Ce jour-là était celui de l'anniversaire d'Aphrodite. Masque de Mort avait préparé une surprise pour son ami, un cadeau dont l'idée ne pouvait germer que dans un esprit aussi cynique et dénué de morale. Fier de sa bonne idée, il entra sans frapper dans l'habitat privé d'Aphrodite, une de ces petites maisons sur les coteaux du Sanctuaire, où les chevaliers passaient peu de temps si ce n'est pour prendre quelque repos. Masque de Mort interpella familièrement son ami en entrant.
"Eh, Aphro', j'ai une surp..."
Masque de Mort s'étrangla, lorsqu'il découvrit la scène. En fait de surprise, c'était lui le plus étonné. Aphrodite était bien chez lui, mais il n'était pas seul. Aphrodite s'était offert son propre cadeau d'anniversaire. Le jeune apprenti qui subissait ses assauts ne s'était pas douté qu'en acceptant de suivre Aphrodite il se retrouverait dans une telle situation. C'est ainsi que Masque de Mort les trouva, nus, suants, Aphrodite derrière son partenaire en larmes.
"A... Aphro... Désolé."
Masque de Mort quitta la maison, comprenant maintenant pourquoi les volets étaient clos en plein jour. Il ne savait plus quoi penser. Il s'était toujours dit que son ami était un peu bizarre, mais il mettait cela sur le compte de son apparence efféminée. Il n'avait jamais pensé qu'Aphrodite pouvait avoir une sexualité... déviante.
Aphrodite le rejoignit à quelques pas de la maison. Il était habillé, impeccable, même, comme si rien n'était arrivé. Masque de Mort vit le novice s'enfuir de la maison en finissant de remettre ses vêtements. Il courrait, à moitié plié en deux par la douleur.
"Je... Aphrodite, je suis désolé, je savais pas..."
"Ce n'est rien. Tu l'aurais su à un moment ou à un
autre. Mais n'en parle jamais. Jamais." La menace était contenue
dans ce dernier mot. Masque de Mort en prit note. De toute façon,
il ne ferait pas de tort à son ami.
"Mais depuis quand..."
"Depuis longtemps déjà. J'ai découvert un jour
que j'aimais les garçons, et que les filles ne m'intéressaient
pas. Te souviens-tu de la jeune fille que tu m'avais offerte pour mon anniversaire,
l'année dernière. C'était une pauvre apprentie chevalier,
et tu l'avais menacée de mort à moins qu'elle ne couche avec
moi. J'avais accepté ton cadeau mais..."
"Tu ne l'avais pas touchée ?"
"J'ai essayé. Pour te faire plaisir. Mais je n'ai même
pas réussi à m'exciter assez pour la prendre. Je l'ai laissée
partir. Je n'aime pas les femmes."
"Merde, moi qui t'avais trouvé un nouveau cadeau d'anniversaire..."
"Oh non, ne me dis pas que tu as encore forcé une fille à
..."
"Eh bien si. Bon, je vais lui dire qu'elle peut rentrer chez elle.
Elle l'aura échappé belle, elle va même pas comprendre
!" Masque de Mort riait.
"Mais et toi ?" Aphrodite prit à nouveau un air suspicieux
"Tu ne vas pas la garder pour toi ?"
"Eheh, non. Je ne touche plus aux femmes depuis un moment." Masque
de Mort avait un sourire forcé. Aphrodite se demanda si cela était
lié aux quelques mois qu'il avait passé en Afrique quelques
années auparavant. Que s'était-il passé là-bas
? A son retour, le Cancer n'était plus le même.
"Peut-être veux-tu que je te présente quelque gentil
garçon ?"
"Quoi ? Te fous pas de moi, moi je suis pas une..." Masque de Mort
s'arrêta juste à temps.
"Une pédale ? Une tante ? C'est ce que tu voulais dire ?"
Le ton d'Aphrodite était amer. "C'est vrai, j'en suis une. Et crois-moi,
pour un chevalier c'est une situation difficile à accepter."
"J'imagine. Je... voulais pas te vexer, te fâche pas."
"Je ne suis pas en colère. J'espère que cet incident
ne va pas..."
"Briser notre amitié ? Non, bien sûr. Que m'importe
avec qui tu t'amuses en privé ? Nous sommes tous deux des chevaliers
d'or, nous faisons partie de l'élite des guerriers. Beaucoup envient
nos pouvoirs. Si nous ne nous serrons pas les coudes, qui sait dans quel
piège nous pourrions tomber ?"
"Bien."
Aphrodite eut soudain un rire.
"Tu as quand même une dette envers moi, maintenant, mon ami. Il va falloir que tu me trouves un nouveau joli garçon pour fêter mon anniversaire !"
Masque de Mort faillit s'étrangler à nouveau.
Aphrodite s'approcha un peu plus et observa le garçon. Il n'avait pas de... vues sur lui, mais le voir s'entraîner était instructif. Le garçon n'était de toute façon pas attirant. Il était mince, brun, mais trop banal de visage. De plus, il était asiatique, et Aphrodite préférait des garçons à la peau plus blanche, un peu comme la sienne.
Le garçon regardait son épaulière, coupée nette par le sabre. Puis il releva la tête, fixant la jeune femme. Celle-ci abaissa le sabre, continuant ses explications, qu'Aphrodite n'entendait pas de l'endroit où il était, mais qu'il pouvait deviner. Le garçon serait-il assez intelligent pour comprendre le principe du "sabre du samouraï" ?
Le novice se releva, attaqua. Son maître riposta avec son épée mais le garçon attrapa la lame entre ses mains puis repoussa son maître d'un coup de pied. Aphrodite sourit. Il avait compris. Le garçon aida la jeune femme aux cheveux roux à se relever, fier d'avoir compris cette leçon.
Un jour sans doute, il deviendrait chevalier.
Aphrodite retourna vers le Colisée. Il avait entendu dire qu'un nouveau chevalier d'argent était arrivé au Sanctuaire. Ce chevalier aurait déjà gagné son armure depuis longtemps, mais était resté auprès de son maître malade, et il ne serait revenu que depuis la veille. Toutes les rumeurs disaient qu'il était fort beau, et fier. Aphrodite se demanda s'il existait vraiment quelqu'un d'aussi beau que lui. Si c'était le cas, il devait le rencontrer.
Aphrodite trouva quelques chevaliers d'argent regroupés autour du nouveau. Celui-ci lui tournait le dos, discutant avec ses alter ego. Il portait un vêtement rose, rehaussant la blancheur de son armure. Ses cheveux blonds tombaient en mèches rebelles jusqu'au milieu de son dos. Il était élancé, mais son torse développé et son fin tour de taille démontraient une bonne puissance physique. Malgré cela, il ne possédait pas cette hypertrophie musculaire que certains chevaliers arboraient presque avec fierté, bombant leurs muscles. A coté des autres chevaliers d'argent, Moses en particulier, il avait même l'air chétif. A l'approche d'Aphrodite, les chevaliers d'argent tournèrent leurs regards vers lui, et le nouveau, intrigué, se retourna.
Aphrodite fut surpris par le visage du chevalier d'argent. Il était presque aussi beau que le sien ! Il avait des traits fins, une peau claire, presque rosée, et de grands yeux bleus. Des mèches rebelles tombaient sur son front, tranchant encore plus avec le bleu de ses yeux. Il lui sourit - ironiquement, peut-être - et lui tendit la main. Aphrodite la serra, jugeant la poigne, ni trop puissante ni trop faible. Quand il ouvrit la bouche, il parla avec une voix mélodieuse.
"Vous êtes Aphrodite des Poissons ? Enchanté. Je suis Misty du Lézard."
Aphrodite lui sourit tout en le regardant dans les yeux, et eut une énorme envie de lui faire l'amour.
"Misty, je peux te parler ?"
"Pardon ? Oh, oui, bien sûr."
Misty avait l'air à moitié surpris qu'Aphrodite veuille ainsi lui parler. Cela faisait déjà huit jours que Misty était arrivé au Sanctuaire, et Aphrodite n'avait pas cessé de penser à lui. Il l'imaginait nu, s'imaginait en train de le prendre. Ses rêves les mettaient en scène dans diverses situations mais toujours nus. Cela en était obsédant.
Aphrodite s'approcha, et comme indépendamment de sa volonté, ses yeux se portèrent vers l'entrejambe de Misty. Il releva rapidement les yeux. Misty le regardait étrangement. Avait-il vu la direction de son regard ?
"Que me voulez-vous, chevalier d'or ?"
"Pas de protocole avec moi, s'il te plaît, Misty. Appelle-moi
Aphrodite."
"Comme vous voulez."
Misty n'osait pas le tutoyer. Il était vrai que peu osaient, à part les chevaliers d'or.
"Je voudrais te poser quelques questions, Misty. Si ca ne te dérange
pas..."
"Non, bien sûr. Que voulez-vous savoir ?"
"Je..." Aphrodite hésita. Ce n'était pas le moment
! "Je voudrais savoir ce qu'un homme aussi beau que toi fait ici. Ce n'est
tout de même pas courant."
"Je le sais. C'est le hasard qui a décidé que je serais
chevalier. Je suppose qu'il doit en être de même avec vous."
Evidemment. La question d'Aphrodite était idiote. Il se maudit de l'avoir posée.
"Je dois avouer avoir été surpris par votre beauté,
Aphrodite. Je pensais être le seul homme à la grande beauté
au Sanctuaire, quand je suis arrivé, mais vous êtes encore
plus beau que moi."
"Allons, pas de flatterie. Moi aussi, j'ai été surpris.
La beauté est rare, alors deux chevaliers aussi beaux que nous réunis
en un même endroit, c'est encore plus rare."
"Oui en effet !" Misty riait. "Heureusement que nous sommes là
pour relever le niveau du Sanctuaire !"
Ils rirent tous deux. Aphrodite était heureux, il avait sympathisé
avec le beau chevalier du Lézard.
Aphrodite et Misty discutèrent longtemps, puis se revirent le jour suivant, et encore le suivant. Leurs discussions tournaient toujours autour de leurs canons de beautés respectifs, qui en fait étaient très semblables. Ils ne respectaient tous deux que leur propre beauté, et leur propre force. La victoire sur un ennemi était pour eux une forme de beauté, à condition que le combat ne les salisse pas, ni dans leur honneur, ni dans leur physique. Misty se targuait d'ailleurs de n'avoir jamais été touché en combat, et de ne pas connaître la douleur. Aphrodite, lui, privilégiait l'esthétique de ses attaques, à bases de roses qu'il chargeait de cosmos pour les transformer en armes.
Aphrodite appréciait ces moments en compagnie d'un homme qui lui ressemblait tant, et qui provoquait en lui tant de sentiments. Misty quant à lui semblait partager l'intérêt pour ces longues discussions autour d'un sujet dont il ne devait pas souvent débattre.
Le sujet dévia un jour sur le sexe. Aphrodite avoua qu'il avait déjà eu des rapports sexuels, mais il omit d'en préciser la nature. Misty, quant à lui, était vierge, mais cela n'était pas étonnant au Sanctuaire, car après tout c'était autant un monastère qu'une caserne. Aphrodite mena habilement la conversation, attentif à tout détail qui pourrait trahir sa préférence pour l'un ou l'autre sexe, mais Misty avait soit compris la manoeuvre et contournait adroitement les pièges verbaux, soit n'avait aucune préférence.
Soudain, Misty coupa court à la conversation.
"Aphrodite, cesse de te moquer de moi, que veux-tu me forcer à dire ?"
Aphrodite fut surpris. Il avait donc compris. Il hésita une fraction de seconde, puis regarda Misty dans les yeux.
"Misty, je suis homosexuel, et j'ai envie de toi. Je veux savoir si c'est réciproque."
Misty ne sut rien dire sur l'instant. Il avait déjà deviné les penchants d'Aphrodite, mais il ne pensait pas être l'objet de ses désirs. Misty se leva.
"Désolé, Aphrodite, mais il m'est impossible de répondre à tes attentes."
Misty partit, laissant Aphrodite seul. Celui-ci baissa la tête, et retint ses larmes. Il avait trop brusqué les choses.
Chapitre 2 : "Beautés Masculines"
Aphrodite se tourna dans son lit, n'arrivant pas à décider s'il devait continuer à chercher en vain le sommeil ou s'il devait abandonner et se lever. Il était déjà tard dans la nuit mais depuis deux jours déjà, le sommeil le fuyait. Depuis que Misty l'avait repoussé.
Il l'avait aperçu, discutant avec des chevaliers d'argent, la veille, mais Misty avait évité son regard. Il devait sans doute lui en vouloir, devait avoir décidé de ne plus lui parler. Aphrodite en souffrait, car il avait aussi perdu son amitié et cela bêtement, en voulant précipiter les événements.
Aphrodite n'arrêtait pas de penser à Misty depuis deux jours. Ses rêves érotiques avaient cessé, il n'était plus obsédé par son corps, mais c'était la présence du chevalier du Lézard qui lui manquait. Il était si doux de lui parler...
On frappa à la porte. Aphrodite s'assit dans son lit, se demandant qui pouvait vouloir le réveiller à une telle heure de la nuit. Sans doute un garde qui venait lui transmettre un message urgent du Pope. Aphrodite n'avait pas le coeur à exécuter une mission en ce moment, mais les ordres du Pope ne souffraient de retard. C'est sans conviction qu'il murmura "Entrez".
La porte s'ouvrit, et dans la clarté lunaire apparut la silhouette de Misty. Aphrodite en fut surpris. Que lui valait cette visite nocturne ? Des images passèrent à nouveau dans son esprit, des désirs inavouables.
"Misty ? Mais que fais-tu ici ?"
"Je voulais te voir. A... A propos de l'autre jour..."
Le ton de Misty n'était pas très assuré. Mais Aphrodite trouva sa voix si belle, après ces deux jours sans l'entendre. Il sentit son caleçon se gonfler.
"Je... Je suis désolé d'avoir réagi comme ca.
Ton aveu était si direct... Je n'ai pas... je n'ai pas su quoi dire."
"C'est normal, Misty. Je ne t'ai pas ménagé."
Misty entra, ferma la porte. Aphrodite devinait sa présence, dans la quasi obscurité de la chambre. Il était de plus en plus troublé.
"Je... j'ai beaucoup réfléchi... Je me suis dit que si je devais faire l'amour avec un homme, une fois dans ma vie, ce serait avec toi."
Le coeur d'Aphrodite fit un bon dans sa poitrine. Alors il acceptait !!
Misty se déshabilla, tandis qu'Aphrodite ôtait ses sous-vêtements, puis entra dans le lit.
Aphrodite se réveilla le premier. Misty était serré contre lui, son visage contre la poitrine d'Aphrodite, leurs jambes encore enlacées. Les souvenirs de la nuit affluèrent et Aphrodite sourit. Quel délice cela avait été. Misty avait un corps si beau, si parfait, et il avait très bien accepté qu'Aphrodite le prenne. Sans doute avait-il eu mal - tout comme lui lors de sa première expérience - mais le plaisir avait du être presque immédiat aussi, car il avait lui aussi atteint l'orgasme à plusieurs reprises.
Aphrodite bougea légèrement, essayant de sortir du lit sans réveiller son nouvel amant, mais Misty ouvrit doucement les yeux.
"Bonjour, Misty. Désolé de t'avoir réveillé."
"Pardon ? Ah oui. Ce n'est rien." Il avait encore les yeux mi-clos,
l'air endormi de quelqu'un qui ne sait pas trop où il est à
son réveil. Il était si beau. Aphrodite se sentit à
nouveau excité, voulait encore lui faire l'amour.
"Ca va, Misty ? Pas trop mal ?"
"Pas terrible. Je crois que je vais pas m'asseoir pendant un ou
deux jours."
Aphrodite connaissait le problème. Il décida de calmer son désir, il ne voulait pas faire plus de mal à Misty. Il se leva, ouvrit un placard, en sortit des sous-vêtements propres, et les posa sur une chaise. Il plongea ses mains dans la cuvette d'eau, s'en aspergea le visage. Puis il s'habilla, tandis que Misty le regardait.
"C'est quand même incroyable."
"Quoi donc, Misty ?"
"Ton visage est vraiment si fin, on dirait celui d'une femme. Mais
ton corps est bien celui d'un homme."
"Tu en doutais encore, après cette nuit ?" Aphrodite riait.
"Oh non ! Je ne risque pas d'oublier !"
Aphrodite se demandait ce qu'il retiendrait de cette expérience : le plaisir ou la douleur. Il espérait que ce serait le plaisir, et qu'il reviendrait le voir pour cela, plus tard. Mais Misty avait dit la veille qu'il voulait une expérience avec un homme. Sans doute était-ce pour comparer les sensations avec celles qu'il aurait avec une femme. De ce coté-là, ce serait bien différent. Au cours de la nuit, Aphrodite ne l'avait jamais laissé le pénétrer, et s'était toujours débrouillé pour jouer le mâle dans leurs rapports.
En fait, depuis sa première expérience avec son amant plus âgé, il n'avait jamais laissé un homme le prendre. Pour une raison qu'il ne parvenait pas à comprendre, il redoutait cette situation.
"Misty, je crois qu'il est temps de se lever. Si tu ne veux pas qu'on
te voit sortir d'ici..."
"Tu as raison."
Misty se leva, nu - Dieux ! qu'il était beau ! - fit lui aussi quelques ablutions, s'habilla, et s'apprêta à sortir.
Au pas de la porte, il s'arrêta, regarda Aphrodite.
"Merci, Aphrodite."
Puis il sortit. Aphrodite se demanda si c'était un au-revoir, ou un adieu.
Aphrodite ne fit pas grand chose ce jour-là. Il décida de faire le tour du Sanctuaire pour voir les chevaliers s'entraîner. Cela flattait toujours son ego de voir des chevaliers inférieurs tenter d'accomplir des exploits qui pour lui étaient de simples formalités.
Le chevalier d'or se promena donc nonchalamment, sans but précis, quand au détour d'une ruine, il surprit deux hommes en train de discuter de lui. Il s'arrêta, et écouta, profitant du fait que les deux hommes ne l'avaient encore ni entendu ni vu.
"... Et t'es sur qu'il est pédé ?"
"Ouais, bien sûr ! Et tu sais pas la meilleure ?"
"Vas-y raconte."
"Un pote à moi a vu Misty, tu sais le nouveau chevalier du
Lézard, sortir de chez les Poissons."
"Oh ? Tu déconnes ? Lui aussi ?"
"Bien sur ! T'as qu'à le regarder un peu. Ca se voit tout
de suite que c'est une tarlouze. Avec ses cheveux blondasses, et ses manières.
Je serais pas étonné qu'ils aient joué à la
'pompe à essence' toute la nuit, moi."
"Ah, arrête, t'es dégueulasse."
"Non, sérieux, ça t'étonne, toi, qu'Aphrodite
soit pédé ? Avec un nom pareil..."
Aphrodite n'y tint plus. Il prit une rose, et la chargea de cosmos. Il surgit soudain devant les deux hommes.
"Apprends, imbécile, que je suis fier de mon nom."
Les deux hommes le regardaient d'un air effrayé. Surtout celui qui se moquait le plus de lui. Celui-là était vraiment lamentable. Son ami ne faisait que l'écouter.
"Sei... Seigneur Aphrodite... Je... vous écoutiez ?"
"D'après toi ? Question : es-tu droitier ou gaucher ? Répond
!"
"Droitier, pourqu... Aie !"
Aphrodite lança sa rose, qui se planta en plein dans la paume de la main droite de l'homme, la traversant de part en part. Le poison allait faire son effet, et la main allait gonfler, en quelques heures, et les chairs se durcir. Jamais cet homme ne récupérerait totalement.
"Désormais, tu es gaucher." dit Aphrodite en s'éloignant, laissant l'homme hurler sous la brûlure du poison.
Aphrodite était tourmenté. Il n'avait pu tuer l'homme, car ce qu'il disait était vrai, même s'il aurait pu le dire différemment. Aphrodite était homosexuel, c'était une vérité connue de tous désormais. Mais à partir de maintenant, ils feraient attention à ne pas en reparler devant lui, sinon il leur en coûterait.
Mais le chevalier était maintenant d'humeur morose. Pour se changer les idées, il décida de retourner sur les terres de son entraînement, pour retrouver avec nostalgie les lieux de son enfance. Des souvenirs le traversaient tandis qu’il visitait les lieux où il avait vécu. Des souvenirs heureux, et des souvenirs cruels. On s’était toujours moqué de lui, et même maintenant, alors qu’il était chevalier. Jamais il ne pourrait vivre en paix. Sa beauté était sa fierté et sa malédiction.
Un petit garçon vint près de lui alors qu'il se trouvait devant la cabane où il avait passé des années en compagnie de son père adoptif.
"Bonjour madame."
"Madame ? Je suis un garçon, moi !"
Aphrodite rit intérieurement de la confusion qui apparut sur le visage du petit garçon. Encore un qui s'y prendrait à deux fois avant de balancer un 'Madame' ou 'Monsieur' à quelqu'un.
"Pardon monsieur. Pourquoi vous regardez ma maison ?"
"J'ai habité ici il y a longtemps. J'avais envie de la revoir."
"Ah bon ? Vous voulez entrer ?"
"Non merci, gamin. J'ai vu ce que je voulais voir. Je suis content
que quelqu'un habite encore ici."
Aphrodite se dit que le gamin avait de grands yeux. Il était beau lui aussi. Un instant le visage de Misty se superposa à celui de l'enfant, et Aphrodite ressentit le désir monter. Il secoua la tête. Il voyait Misty partout, maintenant.
Le chevalier partit, laissant l'enfant avant que ses pulsions ne lui fassent commettre l'irréparable. Il commençait à détester cette part de lui-même qui ne pensait qu'au sexe.
Aphrodite rentra au Sanctuaire, lentement. Il en profita pour passer dans des endroits qu'il avait visités, emplissant sa tête de souvenirs, pour mieux fuir le présent. Il avait peur de retourner au Sanctuaire. Qu'allait-il y trouver ? Des chevaliers se moquant de lui pour son homosexualité ? Misty qui allait lui dire que cette nuit n'avait été qu'une expérience sans lendemain ?
Aphrodite tenait à Misty. Il le savait. Il n'avait jamais ressenti un tel plaisir avec aucun de ses partenaires précédents, mais il y avait aussi autre chose. Misty était comme lui. Il était beau, intelligent, arrogant et fort. Ils se ressemblaient tant physiquement que mentalement. Aphrodite avait eu un instant, la veille, l'impression de faire l'amour avec lui-même et cela avait augmenté son plaisir. Aphrodite s'aimait, et Misty était son reflet. A travers le chevalier du Lézard, Aphrodite pouvait contenter son égocentrisme.
Le chevalier des Poissons était conscient de cela. Il se savait narcissique, et il se doutait que Misty l'avait compris. Sans doute l'était-il un peu lui-même. Mais Misty apprécierait-il de continuer à jouer les substituts ?
La nuit était déjà tombée sur le Sanctuaire quand Aphrodite arriva. Il rentra directement chez lui, se fit à manger. Il n'avait plus le moral, pour une raison qui lui échappait. Peut-être était-il en train de se rendre compte que Misty le fuirait. Cette pensée le peinait profondément.
Aphrodite s'apprêta à se coucher, son repas terminé, quand quelqu'un toqua à sa porte. Misty peut-être, se dit-il plein d'espoir. Mais c'était le Masque de Mort.
"Eh bien, mon ami, tu en fais une tête."
"Oh, c'est rien, un coup de cafard. Que veux-tu, Mask' ?"
"Un truc à te montrer. Tu viens ?"
"Je te suis."
Apres tout, ça le distrairait peut-être.
"C'est tout ? Tu m'as fait venir pour me montrer un chevalier en
train de s'entraîner en pleine nuit ?"
"Bin quoi ? Je l'ai trouvé mignon et tout ça, et je
me suis dit que comme tu avais l'air seul en ce moment..."
"C'est ça, fous-toi de moi. Je croyais que mes fesses ne
t'intéressaient pas."
"Oh moi pour ce que j'en dis..."
"Je rentre."
Aphrodite était furieux. Masque de Mort se moquait de lui, maintenant, et il n'appréciait pas ce genre de plaisanterie. Aphrodite entra chez lui, claquant la porte. En allumant la lumière, il trouva Misty couché, nu, dans son lit.
"Tu as l'air furieux, Aphrodite. Mais je crois que demain tu devras présenter tes excuses à Masque de Mort. C'est moi qui lui ais demandé de faire diversion."
Aphrodite ne sut quoi dire. Misty lui montra un pot sur la table de nuit.
"J'ai fait le plein de vaseline. C'est pas très agréable, mais ça aidera à faire passer la douleur. Ca te dit ?"
Aphrodite ôta ses vêtements en moins d'une minute.
Aphrodite changea de position, mais tout en continuant ses allers et venues. Misty accepta le changement, la crème autorisant le glissement des chairs en atténuant la douleur. Aphrodite lui fit face, puis s'allongea sur lui. La position était inconfortable, mais c'était la seule façon pour lui de pouvoir l'embrasser. Leurs lèvres se joignirent, leurs langues jouant l'une avec l'autre, tandis qu'il continuait de forer le corps de Misty. Il sentait la chair de celui-ci, prisonnière entre leurs ventres, tendue comme au point d'exploser. Lui-même sentait venir les dernières vagues de plaisir.
Mais Misty le repoussa, s'arrachant à ses baisers, puis le forçant à se retirer.
"Pourquoi ?" demanda Aphrodite, surpris qu'il cesse ainsi leurs ébats
alors qu'ils approchaient de la conclusion.
"C'est à mon tour."
Aphrodite ne comprit pas tout de suite, mais quand Misty tendit la main vers le pot de vaseline, il réalisa que son amant voulait inverser les rôles. Une vague de panique le submergea. Il était en train de vivre la même situation que celle qu'il avait déjà vécue, des années auparavant, avec son premier amant. A un détail près, c'était que Misty était à sa place, et lui à celle de son initiateur.
Aphrodite se demanda pourquoi Misty voulait le pénétrer. Pourquoi, en son temps, avait-il voulu ? Il avait pris du plaisir dans cet autre rôle, et maintenant, il avait peur de changer. Et s'il refusait ? Se disputeraient-ils comme il l'avait fait avec son initiateur ? En viendraient-ils à se battre ? Si c'était le cas, Misty n'avait aucune chance.
Aphrodite ne voulait pas blesser Misty. Il refusait d'entrer en conflit avec lui. Il décida de prendre sur lui et d'accepter le changement. Si c'était le prix à payer pour rester avec Misty, il était prêt à s'en acquitter.
"Laisse-moi faire" dit Aphrodite, prenant le pot de crème des mains de son amant. Il en prit une bonne quantité, s'approcha de Misty et l'appliqua consciencieusement. Misty gémit à son contact, se dilatant encore plus. Aphrodite se prit au jeu et fit durer le plaisir, massant la chair, la recouvrant de la substance qui glissait entre ses doigts. Puis il cessa, et s'installa sur le lit, invitant Misty à le rejoindre.
Aphrodite ferma les yeux, attentif aux sensations. La douleur fut vive, intense, et il retint un cri. Cela faisait si longtemps... Son corps avait perdu l'habitude, mais il la retrouva très vite. Misty disparut entièrement en lui, comme si le corps d'Aphrodite avait complètement absorbé la colonne de chair. Misty commença à bouger, et le plaisir afflua dans tout le corps d'Aphrodite. La sensation était si différente. Aphrodite se demanda comment il avait pu pendant si longtemps se passer de ce délice.
Misty n'avait pas un très grand contrôle de ses émotions, et l'étreinte fut brève, rendue plus rapide encore par l'étroitesse d'Aphrodite. Misty explosa, répandant ses vibrations dans tout le bassin de son amant. Celui-ci était lui-même au bord de l'orgasme, et lorsque Misty se fut retiré, il ne lui fallut pas longtemps non plus pour se répandre dans la bouche de ce dernier.
Suants, ils se jetèrent tous deux cote à cote, sur le lit monoplace qui craquait sous leur poids.
"Dieux, ça faisait si longtemps que j'avais pas ressenti ça..."
Aphrodite se rendait compte à quel point il avait été
stupide. Par orgueil, il s'était imposé de toujours dominer
son partenaire, mais se rendait compte maintenant qu'il appréciait
autant, voire plus, d'être lui-même chevauché.
"Ah bon ? Ca t'a pas fait mal au moins ?"
"Non, non. C'était parfait. Mon corps s'en est souvenu. Merci,
Misty."
"Merci de quoi ? C'est normal, non ? Chacun doit pouvoir en profiter.
J'attends avec impatience que tu sois déjà prêt à
recommencer."
Aphrodite lui sourit, tout en caressant sa joue. Ils étaient vraiment faits pour s'entendre. Comment avait-il pu se passer de lui jusqu'à maintenant ?
"Misty, je souhaite qu'il en soit ainsi pour toujours. Je..." Aphrodite
ne revenait même pas de ce qu'il allait dire. "Je crois que je t'aime."
"Je t'aime aussi, Aphrodite. Tu es vraiment extraordinaire."
Ils s'embrassèrent passionnément, longuement, tandis que leurs corps récupéraient toutes leurs facultés. Puis leur étreinte redevint plus charnelle.
"Bon sang, que fait-il, il est en retard !"
Aphrodite était furieux. Il avait préparé un repas exprès pour eux deux, car cela faisait un an aujourd'hui qu'ils vivaient ensemble. Et Misty était en retard. Le Pope l'avait fait demander la veille, avec plusieurs chevaliers d'argent, pour une mission, et il n'était pas encore rentré. Le dîner refroidissait et Aphrodite n'aimait pas manger froid.
La porte s'ouvrit violemment.
"Enfin ! Pas trop tôt ! Que faisais..." Aphrodite ne termina pas sa phrase. Ce n'était pas Misty qui entrait mais Masque de Mort. Il avait un air très sérieux.
Le chevalier du Cancer s'approcha, posa ses deux mains sur ses épaules et le força à s'asseoir.
"Aphro' ! Misty est mort !"
"Quoi ?"
Aphrodite encaissa difficilement la nouvelle. Il réalisa la situation, mais elle lui parut complètement impensable. Misty mort ? Mais c'était bien sûr une erreur. Misty ne pouvait mourir. Aphrodite tenta de se lever mais le Masque de Mort le maintint assis.
"Ce sont les chevaliers de bronze. Ils ont tué plusieurs chevaliers de bronze et d'argent que le Pope avait envoyés. Deux autres chevaliers envoyés pour les combattre les ont rejoints. Gygar est introuvable, ainsi que Shaina et Marin. C'est la panique au Sanctuaire. La guerre est déclarée avec ces chevaliers de bronze."
Aphrodite était incapable de parler. La nouvelle le sidérait et le terrifiait à la fois. Il n'arrivait pas à accepter qu'il ne verrait plus Misty, qu'il ne pourrait plus lui parler, le toucher. La colère montait en lui.
"Mask' ! Allons voir le Pope !" dit-il en se levant de la chaise,
repoussant son ami.
"Pourquoi faire, Aphro' ? Ravale ta fureur. Si la guerre doit se
déclencher, tu seras assez tôt au combat. Ca ne servirait
à rien de déranger le Pope maintenant. C'est pour ca que
je suis venu, pour te calmer. Attends ton heure, et tu seras vengé."
Aphrodite tremblait de rage. Il voulait exterminer immédiatement ces maudits chevaliers. Mais Masque de Mort avait raison, il devait attendre. Au pire, les chevaliers de Bronze attaqueraient le Sanctuaire et ils devraient alors battre les chevaliers d'or, et à ce moment-là, il se vengerait.
Aphrodite réapparut devant la Maison des Poissons. Albior était mort, sa mission était accomplie. Mais il repensait au jeune guerrier qui ressemblait à Misty. La douleur était encore vive, mais elle disparaissait vite, pour laisser la place à la détermination. Le fait d'avoir tué l'un des maîtres des chevaliers le calmait aussi.
Il retourna à la maison du Cancer. Masque de Mort l'inquiétait. Depuis qu'il était revenu de Rozan, il n'était plus le même. Il paraissait plus calme, comme s'il attendait un événement d'une extrême importance. Il ne parlait presque plus, semblait se perdre dans des pensées secrètes. Aphrodite se sentait impuissant devant lui, ne comprenant pas comment il pouvait lui remonter le moral.
Masque de Mort ne fut pas beaucoup plus bavard ce jour-là.
Quelques jours plus tard, il débarqua, extatique, chez Aphrodite.
"Ils vont venir ! La fille a envoyé une lettre au Pope, les
chevaliers vont venir se battre !"
Il semblait excité à l'approche du combat, comme si
cela devait être son dernier. Pourtant, ce ne seraient pas quelques
chevaliers de Bronze qui pourraient battre les chevaliers d'or. Mais Aphrodite
accueillit aussi bien la nouvelle.
"Enfin ! Ils vont venir mourir au Sanctuaire ! Je ne regrette qu'une
chose, c'est d'être le dernier des chevaliers d'or. Je ne les tuerai
sans doute pas moi-même, mais j'assisterai à leur fin, et
cela me suffit. Quand doivent-ils venir ?"
"Demain."
"Plus qu'un jour à attendre."
Aphrodite contenait sa joie. Mais il lui sembla entendre Masque de
Mort chuchoter :
"Plus qu'un jour avant la mort..."
"Nebula... "
"Meurs, Andromède ! Bloody Rose !"
"Folie ! Nebula Storm !"
La tempête emporta Aphrodite jusqu'au toit de la Maison, où il se fracassa le crâne. Il retomba lourdement au sol, conscient que tous ses os étaient brisés dans son corps, malgré l'armure. Il sentait le sang couler de son crâne ouvert, sentait la vie lui échapper.
"Im... impossible..."
Comment un chevalier de Bronze pouvait-il avoir tant de puissance ?
"Nous mourrons ensemble, Andromède..."
Cela au moins le rassurait.
Sa vue se troubla, tandis qu'Aphrodite perdait l'usage de ses autres sens. Il flottait dans un brouillard flou, n'entendant rien, incapable de se mouvoir.
"Aphro'."
Aphrodite se retourna dans son étrange univers en entendant la voix de Misty. Il se tenait debout devant lui, nu, les bras tendus vers lui. Aphrodite s'aperçut qu'il était lui-même nu, son armure d'or avait disparu.
"Tu es venu me rejoindre."
"Bien sûr. Nous serons toujours ensemble."
"Irons-nous en Enfer ou au Paradis ?"
"Qu’importe ! Cela a-t-il de l’importance pour toi ?"
"Non, du moment que tu es avec moi."
Aphrodite se jeta dans les bras de Misty, abandonnant sa vie de mortel pour une éternité auprès de son seul amour.
Fin de "Aphrodite"
Prochain chapitre : "Marin"