"Saint Seiya in Love : Dohko"

Chapitre 1 : "L'apprenti"


Je vais mourir.

Mon nom est Dohko, je suis le chevalier d'or de la Balance. A mes cotés se trouvent Shaka de la Vierge et Milo du Scorpion. Nous venons de lancer tous ensemble nos plus puissantes attaques. Les douze chevaliers d'or se sont alliés pour détruire le mur des Lamentations. Et nous avons réussi. Le mur a explosé, et Shiryu mon disciple et ses amis vont pouvoir le traverser et atteindre l'Elysée où Hadès retient Athéna prisonnière.

Le mur a explosé. Et l'énergie formidable engendrée par cette explosion revient maintenant vers nous. Je peux voir la vague qui fonce vers moi, vers mes compagnons. Nous allons être engloutis par cette vague et nous allons périr. Je n'ai plus de force, j'ai tout donné pour détruire le mur. Mes compagnons sont dans le même cas. Nous allons mourir ensemble.

Cette vague d'énergie revient vers nous à une vitesse formidable. Mais à l'instant de ma mort, mon cerveau fonctionne à toute vitesse. Je suis capable de penser à tant de choses, je revois tant d'événements. J'ai vécu pendant 261 ans, au service d'Athéna. Une vie bien remplie, longue, très longue. Je peux mourir sans regret.

Si, j'ai un regret. Puisque je dois mourir maintenant, je vais passer mes derniers instants à penser à elle. Mon seul amour.


J'avais treize ans lorsque je l'ai rencontrée pour la première fois. J'étais encore sous la tutelle de mon maître, un homme sage que j'appelais Roshi. Son propre maître s'appelait Roshi. Un jour on m'appellerait Roshi.

Roshi m'avait emmené dans un village non loin des Vieux Pics. Il m'avait confié aux soins d'un artisan, un maître tatoueur. Je devais recevoir le tatouage rituel. C'était une tradition des Roshi. Mon maître portait le Singe tatoué sur son dos. J'allais recevoir le Tigre.

J'avais accepté de recevoir le tatouage, j'acceptais toujours ce que mon maître disait. Je lui obéissais en tout. Je n'avais pas peur de Roshi, car j'étais déjà plus puissant que lui. Je le respectais. C'était un chevalier d'argent, mais il était assez doué, assez savant, assez pédagogue pour avoir réussi à ouvrir mon esprit à des choses que lui même de maîtrisait pas. Il avait su m'apprendre à apprendre. C'était un bon maître, sévère quand il le fallait, bon le reste du temps. Même si ma force dépassait la sienne, j'avais encore beaucoup à apprendre de lui.

Le maître tatoueur commença son ouvrage. Roshi lui avait donné des encres spéciales, dont le secret ne me serait confié que plus tard, pour ce travail. Ces encres ont la particularité d'être totalement invisibles à la température du corps. Seul un échauffement de la température les fait apparaître, qui ne peut survenir que lorsque l'on concentre son cosmos. Ainsi le tatouage démontrait que j'étais un chevalier, en pleine possession de ses moyens.

Quand je dis un chevalier, ce n'était pas vrai à l'époque. Je n'avais pas encore reçu d'armure, et je n'étais qu'un apprenti, même si je possédais déjà la puissance des chevaliers d'or.

Le rituel du tatouage était autant une marque qui confirmait que j'étais le disciple de Roshi, qu'une épreuve. Pour que le maître puisse tatouer mon corps, il fallait qu'il puisse voir l'encre. Je devais donc concentrer en permanence mon cosmos afin qu'il puisse juger de son travail au fur et à mesure. Il lui fallut six jours pour terminer son oeuvre.

Pendant ces six jours, j'ai du lutter contre la fatigue, concentrer mes forces, rester immobile, allongé sur le ventre, mon dos exposé aux coups de pointe du tatoueur. Comme mon maître avant moi, je fus pris de fièvre pendant ces six jours. Mon dos me faisait mal, les milliers de petits coups d'aiguilles qui perçaient ma peau étaient insignifiants isolement, mais terribles regroupés tous ensembles. J'avais l'impression qu'on m'avait arraché la peau du dos. Cette épreuve fut un calvaire. Nécessaire mais difficile. En comparaison, Shiryu l'a bien mieux supporté que moi. Il est vrai aussi que la technique des tatoueurs a un peu évolué depuis le 17e siècle.

Mais cette épreuve, je l'ai surmontée grâce à quelqu'un. Huang, la fille du tatoueur. Pendant six jours, elle m'aida à manger et à boire, car je n'avais pas le droit de bouger de la couche où j'étais installé. Elle épongea ma sueur, et calma mes poussées de fièvre grâce à des compresses d'eau fraîche, qu'elle allait chercher au puits du village. Elle s'occupa de moi, lavait mon visage, vidait le pot dans lequel je faisais - dans une position O combien inconfortable - mes besoins. Elle fit tout cela avec le sourire, me prodiguant des conseils sur la façon d'étirer mes membres sans bouger le reste de mon corps, afin d'éviter l'ankylose. Elle m'encourageait, me donnait de la force.

Ses yeux et ses cheveux étaient d'un noir de jais. Ses yeux surtout, des puits sans fond dans lesquels j'ai perdu mon âme. Huang fut mon premier amour. Cette fille, par sa gentillesse, sa force intérieure avait éveillé en moi de nouveaux sentiments. Oh à l'époque je n'étais encore qu'un gamin, à peine pubère, et fort timide. Nous avons échangé quelques mots, mais rien de très personnel, juste des remerciements de ma part, des encouragements de la sienne. Mais en se parlant, nous nous regardions dans les yeux. Je ne pouvais me décrocher de son regard. J'étais éperdument amoureux.


Mais l'entraînement a repris, après le tatouage, et je revins aux Cinq Pics avec Roshi. Je laissais à regrets derrière moi cette fille, mais mon maître sut capter à nouveau toute mon attention, intensifiant l'entraînement au point que je ne pensais plus qu'à cela. Mais je n'avais pas oublié.
 

Un jour, des années après ma rencontre avec Huang, mon maître m'annonça que nous allions partir voir Athéna au Sanctuaire. Nous partîmes au matin, et arrivâmes en Grèce, berceau des Chevaliers, dans l'après-midi. Nous avions traversé des forêts, des montagnes, à la vitesse de mon maître. Je n'étais jamais allé au Sanctuaire, et j'avais du mal à imaginer cet endroit. Si j'avais su où cela était, j'aurais sans doute pu y emmener mon maître à la vitesse de la lumière.

Le Sanctuaire semblait en pleine activité. Partout des chevaliers s'entraînaient, des apprentis écoutaient leurs professeurs. Le Sanctuaire se préparait à la guerre. Nous traversâmes les douze maisons, dont seules six étaient occupées. Les chevaliers d'or nous laissèrent passer, reconnaissant en moi l'un de leurs futurs compagnons. Sur les six chevaliers d'or seuls deux avaient mon âge. C'étaient Argos, chevalier des Gémeaux, qui venait d'être confirmé, et Shion, chevalier du Bélier, qui avait reçu son armure l'année précédente.

Shion me parut tout de suite sympathique. Plus tard, nous devînmes amis, et frères d'armes. Argos était plus taciturne, solitaire même, et je ne parvins jamais à vraiment le comprendre. Quant aux quatre autres, ils avaient quinze ans de plus que moi, et j'eus beaucoup de mal à toucher leur confiance, bien que j'ai gagné leur respect.

Arrivés au palais du Pope, nous fûmes conduits devant Athéna, dans la Salle du Trône. Une fois face à elle, j'ai immédiatement compris qu'elle était une déesse. Ma déesse. Elle était grande, élancée. Elle portait une robe blanche, synonyme de virginité. Son regard était fier et droit. Elle était Athéna, la Vierge de la Guerre. Ses cheveux verts tombaient en cascade sur ses épaules, et sa peau nacrée lui donnait un air fragile. Elle était divinement belle.

Mais pourtant, sa beauté était défigurée. Une cicatrice partait depuis l'arcade sourcilière de son oeil droit, et descendait le long de son visage jusqu'à la lèvre supérieure. Son oeil crevé avait une teinte grisâtre, étrange à cote de son oeil valide, vert, aux reflets changeants. Et la vilaine balafre qui ouvrait sa lèvre déformait son sourire en un rictus montrant ses dents.

J'apprit plus tard que cette blessure lui avait été faite dix ans plus tôt, lors de la guerre qui l'opposa à Poséidon. Athéna avait affronté avec cinq chevaliers d'or les généraux des mers qui protégeaient le Dieu des Océans. Les sept généraux périrent et un seul chevalier d'or perdit la vie. C'est au cours du combat qui opposa Athéna et Poséidon que la déesse reçut un coup de trident en plein visage. Athéna parvint à enfermer l'âme de Poséidon dans une urne, et la guerre fut finie.

Comme mon maître, je m'agenouillais devant la déesse, et celle-ci parla.

"Voici donc votre disciple, Roshi. Je vois que vous en avez fait un postulant à l'armure d'or. Je vous félicite."
"Je n'ai fait qu'obéir à vos ordres, Déesse. Je pense qu'il sera prêt pour la Grande Guerre."
"Il le sera. Nous avons besoin de chevaliers puissants. Votre disciple semble surpris. Vous ne lui avez donc pas expliqué."
"Non, je pensais vous laisser le faire. Je vous remets mon disciple, Déesse Athéna. Je n'ai plus rien à lui apprendre."

"Dohko" Athéna se tourna vers moi. Je la regardais, et l'écoutais. "Voici la situation. Hadès va bientôt lancer une grande offensive, et une nouvelle guerre sainte va commencer. Les esprits des 108 Spectres se mettent en mouvement, cela je peux déjà le sentir. Le Sanctuaire va avoir besoin du plus grand nombre de chevaliers possibles. Or nous avons un gros retard sur notre adversaire, et je ne pourrais compter que sur sept ou huit chevaliers d'or pour m'épauler, ainsi qu'une trentaine de chevaliers de rang moindre. Nous nous battrons à un contre trois. La situation est grave."

"Je comprends, Déesse Athéna. Vous semblez prévoir le moment de l'attaque."
"En effet. Il nous reste deux ans."


L'épreuve finale qui conclut ma formation et me confirma au titre de chevalier d'or ne fut pas bien difficile. En ces temps où le moindre apprenti pouvait se révéler être un futur chevalier, on faisait attention à ne pas tuer un homme pendant l'entraînement, car cet homme pourrait un jour sauver la vie d'Athéna. Je dus donc affronter un autre chevalier d'or, dans un combat régulier. Je fis la preuve que je maîtrisais mon septième sens, et fus accepté au sein de l'ordre. Mon maître m'avait formé, à mon insu, pour devenir le gardien des douze armes, le chevalier de la Balance. Désormais, je n'étais plus un apprenti, j'étais un chevalier.

Je restais encore deux jours au Sanctuaire, afin de découvrir le Temple que je devais protéger. Mon maître m'enseigna aussi l'usage des douze armes de l'armure d'or. Et je fis aussi la fête. Les autres chevaliers d'or parvinrent à me convaincre de participer à un banquet en mon honneur. C'est au cours de ce banquet que j'ai sympathisé avec Shion. A l'époque, tout me paraissait si simple. Je n'aurais jamais dû quitter le Sanctuaire, à ce moment-là.
 
 

J'obtins l'autorisation de retourner aux Cinq Pics, pour continuer à m'entraîner. Mon maître resta au Sanctuaire, car il avait décidé de rendre son armure, se jugeant trop vieux pour participer à la guerre prochaine. Athéna avait accepté mais tenait à le garder auprès d'elle comme conseiller tactique. Je me retrouvais donc seul aux Cinq Pics.

Il ne me fallut pas longtemps pour retrouver Huang. Elle vivait toujours dans le même village, et aidait toujours son père. Elle était désormais une ravissante jeune femme. Sa féminité n'était pas encore pleine, mais son corps s'était transformé, avait embelli. Son visage était plus fin, sa peau plus mate, brunie par le soleil. Ses formes aussi avaient changé, faisant de la jolie adolescente une femme désirable.

Je ne la retrouvais pas complètement par hasard. J'avais vraiment décidé d'aller dans son village. Je voulais la revoir. Quand elle me vit apparaître à la porte de sa maison, elle ne parut pas surprise, comme si elle s'attendait depuis toujours à me voir passer le pas de sa porte. Ses salutations furent polies, réservées, sans doute dues à la présence de son père, mais je pouvais lire dans son regard qu'elle était heureuse de me revoir. Je réalisais alors à quel point nous avions changé tous deux. Nous étions désormais deux jeunes gens, éveillés aux réalités de la vie, conscients de nos propres désirs. Et je savais que je la désirais.


Je revins la voir souvent dans son village, passant beaucoup de temps avec elle. Trop de temps, aurait sans doute dit mon maître. Je négligeais mon entraînement pour passer plus de temps avec elle. Nous discutions longuement, parlant de choses et d'autres, n'osant jamais avouer ce que nous ressentions. Nous devenions chaque jour plus proches.

Et puis un soir, loin du village, je lui déclarais ma flamme. Cette nuit est restée gravée dans ma mémoire, c'était il y a 245 ans.

"Huang, je dois te dire quelque chose. Je t'aime."
"Mois aussi, je t'aime Dohko. Mais je crois que mon père ne sera jamais d'accord pour que l'on se marie."
"Je me moque de ton père. Je veux t'emmener avec moi. Nous vivrons aux Cinq Pics, nous fuirons même plus loin si un jour ton père nous retrouve."

"La colère de mon père sera terrible. Je suis sa fille unique. Je me dois de rester auprès de lui pour ses vieux jours. Il veut me marier avec un petit noble, un homme qui a commandé un tatouage pour sa troisième épouse. Mais je ne veux pas me marier avec lui. Il a déjà assez de femmes. Je comprends mon père, je sais qu'il a peur de la vieillesse. Mais je ne veux pas lui obéir."

"Alors viens avec moi. Quitte ton père. Nous reviendrons le voir un jour, quand nous serons mariés, et il ne pourra alors rien dire. Reste avec moi."
"Je te suivrais, Dohko, où que tu ailles."

Je l'embrassais alors, passionnément. Elle répondit à mon baiser, et nous finîmes par nous étendre, côte à côte, dans l'herbe fraîche, nos lèvres toujours soudées.


Huang me regarda ensuite, d'un air entendu. Elle était prête à m'offrir son corps. Elle voulait me donner une preuve plus forte que ses mots. Elle était consciente du désir qui nous animait tous deux. Elle commença à déboutonner ma chemise, son regard m'invitant à la déshabiller moi-même.

Je n'avais encore jamais vu de femme nue. Cela était dû à l'isolement dans lequel j'avais vécu pendant toutes ces années. Le corps féminin était encore pour moi voilé de mystères. Bien sur, je connaissais son anatomie, car les détails pratiques, les points forts et faibles, étaient aussi utiles pour ma formation, mais les schémas que Roshi dessinait dans le sable n'étaient qu'abstraction. Je découvrais enfin la vérité.

Huang possédait un corps superbe. Sans doute, si j'avais connu d'autres femmes, l'aurais-je trouvé quelconque, mais pour moi elle était la beauté absolue. Elle me laissa la découvrir, me laissa poser mes mains sur sa peau. Je caressais longtemps la courbe de ses hanches, avant de revenir vers sa poitrine. Je pris ses seins dans mes mains, les pressant, voulant connaître leur densité, leur force. Je sentais que sous ma main ses mamelons durcissaient. Huang me laissait faire, mais ne restait pas inactive. Elle aussi caressait ma peau, glissant sur mes muscles, électrisant tout mon corps avec le bout de ses doigts.

Puis elle descendit plus bas, saisissant mon membre dressé. Le contact de ses mains sur mon sexe me fit frémir. L'espace d'un instant, je fus comme paralysé, car j'avais l'impression que tout mon corps s'enflammait. Elle profita de cet instant pour se déplacer, et pencha sa tête sur moi, m'avalant, m'embrasant. De sa bouche, de ses mains, elle me contrôlait. J'avais fermé les yeux, concentré sur la sensation qui montait en moi. Je les rouvrais pourtant, pour regarder faire ma maîtresse, pour l'admirer dans son oeuvre. Ce qu'elle faisait, elle ne l'avait pas appris. Elle ne l'avait jamais vu. Elle suivait son instinct, faisait ce qui lui semblait naturel de faire. Et elle le faisait admirablement. Ni trop vite, ni trop lentement. Elle maintenait en moi l'excitation, mais ne précipitait pas son dénouement. Elle maîtrisait parfaitement la situation.

Je voulus à mon tour lui rendre hommage. Je m'arrachais à son étreinte, jugeant préférable d'interrompre ses caresses avant que d'exploser, puis je la renversais dans l'herbe et enfouis mon visage au coeur de son intimité. Elle gémit dès que ma langue s'insinua en elle. Je ne m'étais jamais jugé capable de faire une chose pareille, j'avais du mal à imaginer une telle situation. Mes connaissances anatomiques me disaient que ce que je faisais n'était pas très propre, mais je n'éprouvais aucun dégoût, juste l'agréable sensation que ce que je faisais était adéquat, et lui faisait plaisir. Je humais sa chair, remplissait mes narines de son parfum. J'explorais toujours plus avant, m'aidant de mes doigts pour ouvrir son corps. Je goûtais le nectar de son intimité, un nectar qui serait désormais interdit à tout autre que moi. Huang gémit plus fort tandis que je la menais au plaisir.

Puis je me relevais, et la regardais dans les yeux. Il était temps pour nous de nous unir. Elle prit l'initiative, me fit asseoir en tailleur, puis, me rejoignit et s'assit elle aussi. La sensation fut différente de celle que j'avais eu dans sa bouche. J'étais entouré de chaleur, de douceur. Elle était vierge mais sous son propre poids, la résistance ne dura guère et je plongeais tout d'un coup dans un nouvel univers, tandis qu'elle s'asseyait en tailleur, ses jambes autour de mes reins, consolidant l'édifice vivant que nous formions.

Accrochée à mon cou, elle commença à onduler, se soulevant pour mieux retomber sur moi, m'ouvrant une voie en elle. Très vite, je plaçais mes mains sous ses fesses pour l'aider à se hisser, amplifiant ainsi le mouvement afin qu'elle profite au mieux de toute ma longueur. Ses seins frottaient sur ma poitrine à chacun aller et à chaque retour. Elle recommença à gémir, tandis que le plaisir montait à nouveau. Quant à moi, je respirais plus profondément, tentant de contrôler mon excitation par le yoga, afin que dure cette étreinte. Ensemble, nous nous regardâmes, plongeant notre regard dans celui de l'autre, y lisant la même passion. Nos lèvres se joignirent à nouveau, nos langues formant un autre pont de chair qui nous unissait. Mais l'inéluctable devait se produire et enfin l'orgasme survint. Je cessais mes mouvements et elle fit de son mieux pour s'ouvrir encore, me laissant exploser au plus profond de son corps, et s'autorisant elle-même à laisser se répandre dans tout son corps la tension qu'elle retenait déjà depuis trop longtemps.

Rassasiés, suant, nous nous étendîmes côte à côte sur l'herbe. Je caressais son visage, elle me sourit. Je fermais les yeux pour goûter ce bonheur. Je me sentais enfin un homme.

Nous fîmes l'amour encore et encore cette nuit-là, chacun découvrant l'autre, fascinés par le plaisir que nous étions capables de nous donner mutuellement. Nous goûtions la vie, fondamentale, la loi naturelle la plus simple au monde et pourtant la plus complexe, mettant en jeu des mécanismes, des forces incommensurables pourtant contenues en chacun de nous. Cette alchimie éternelle mettant en jeu un homme et une femme, cette force qui nous faisait profiter chaque instant de la présence de l'autre.

Nous nous aimions, tout simplement.


Chapitre 2 : "L'immortel"


Nous avons vécu heureux pendant presque deux ans. Huang vivait avec moi aux Cinq Pics, et jamais son père n'était venu pour la reprendre. S'il était venu, j'aurais protégé Huang. Même si rien n'était officiel, je la considérais comme mon épouse.

La vie était faite de joie, et d'amour. Je passais mon temps à m'entraîner et à cultiver la terre. Je chassais ou péchais aussi - j'ai toujours aimé la pêche - afin de varier les menus. Huang préparait les repas, s'occupait des tâches ménagères. Nos journées pouvaient sembler monotones, mais elles étaient en fait très simples. Souvent je m'arrêtais un instant, juste pour la regarder étendre le linge ou balayer devant la porte. Elle était toujours plus belle.

Nous nous retrouvions souvent le soir, et faisions l'amour comme lors de notre première nuit. Avec autant de passion, autant de fougue. Nous découvrions toujours de nouveaux jeux, et pimentions ainsi notre relation. Ce fut la période de ma vie où je ressentis vraiment la plénitude.

Une nuit, après l'amour, Huang me regarda bizarrement. Je m'interrogeais sur ce regard.

"Dohko, je crois que dans quelques mois, je ne pourrais plus te satisfaire."

J'étais choqué.

"Mais pourquoi ? Que doit-il se passer dans quelques mois pour que tu ne puisses..."

Je m'interrompis soudain, en comprenant ce qu'elle voulait dire.

"Tu... tu attends un enfant ? C'est cela n'est-ce pas ?"

Elle acquiesça, souriant devant mon expression. J'étais fou de joie.

De ce jour et pendant des semaines, je lui fis l'amour avec plus de délicatesse encore.


Les mois passèrent. Notre enfant devait naître trois mois plus tard. Je m'occupais de plus en plus de Huang, qui avait du mal pour la plupart des corvées de la maison. Son dos lui était douloureux, mais elle ne s'en plaignait pas, acceptant son état avec sérénité. La grossesse, bien qu'éprouvante, la mettait en joie.

J'étais en train de faire une lessive à sa place tandis qu'elle se reposait, lorsque je ressentis un cosmos. Un chevalier d'argent.

"Seigneur Dohko, je viens de la part d'Athéna vous remettre un message."
"Oui ? Voyons cela."

J'ouvris la missive, la parcourus, et me figeais. Athéna m'ordonnait de revenir au Sanctuaire, afin de faire les derniers préparatifs. Les esprits d'Hadès étaient de plus en plus forts, et la guerre était imminente. Tous les chevaliers de par le monde devaient rejoindre Athéna, et attendre l'assaut.

Je regardais le messager. J'avais pris ma décision.

"Veuillez dire à Athéna que j'ai pris bonne note de son message. Mais je souhaite rester ici pour le moment. Ma femme est enceinte, je ne peux la laisser seule. Je viendrais lorsque la guerre commencera."

"Je comprend vos raisons, Seigneur, mais je suis tenu de vous informer que l'ordre d'Athéna est impératif. En vous remettant ce message, je dois vous prévenir que nulle exception ne sera tolérée. Vous étiez prévenu de la guerre à venir, et deviez vous y préparer. Si vous ne venez pas immédiatement au Sanctuaire avec moi, je serais obligé de signaler votre absence. Vous serez déclaré comme traître et pourchassé par les autres chevaliers d'or. Au mieux, vous rendrez votre armure, au pire, vous serez exécuté. Je suis désolé, ce sont les ordres."

"Je comprends. Mais je ne peux venir pour le moment. Veuillez transmettre ce message à Athéna. Dites-lui que je souhaite qu'un chevalier d'or vienne ici pour récupérer mon armure. Je ne participerais pas à cette bataille."
"Soit. Mais je crains que votre refus n'irrite Athéna. Et elle seule décidera de la sentence. Deux chevaliers de bronze ont déjà été exécutés. Eux aussi avaient des obligations familiales."
"Quelle folie ! Comment Athéna peut-elle ainsi sacrifier ses hommes ?"

Je repensais alors à la cicatrice. Athena était amère. Elle était la déesse de la guerre, et cette guerre serait sans pitié. Athéna était aussi forcée d'agir ainsi. Les conditions étaient défavorables, et tout écart devait être puni. Ce qu'elle faisait n'était pas cruel, mais elle se devait de donner l'exemple. Elle avait besoin d'une armée obéissante pour éviter une guerre semblable à celle de Poséidon, cette guerre qu'elle ne pourrait jamais oublier car elle en portait la trace dans sa chair. Mais je ne pouvais me résoudre à abandonner Huang.

"Dohko..." Je me retournais. Huang était au pas de la porte. "Dohko, je peux encore me débrouiller seule. Tu dois y aller, c'est ton devoir. C'est pour cela que tu as accepté l'armure, c'est pour cela que tu as accepté le tatouage. Tu es un chevalier."
"Mais comment vas-tu faire, seule ? Tu ne peux pas..."

"Seigneur Dohko... " Le chevalier sembla hésiter puis continua. "Peut-être pouvez-vous demander à Athéna que des novices soient envoyés ici pour s'occuper d'elle ? De nombreux aspirants ne pourront participer à la guerre, ils ne sont pas prêts. Ils pourraient se rendre utile, ici."

"Mais.." L'idée n'était pas mauvaise, mais je n'arrivais pas à être convaincu.

"Accepte, Dohko. Je m'en sortirais. Et puis, cela ne durera pas longtemps. Tu reviendras avant la naissance de ton fils."
"Soit. Puisque tu me le demandes. Je te ferais envoyer deux jeunes pour t'aider. Et je reviendrais vite."

J'endossais mon armure, embrassais Huang, et suivis le chevalier. Il se passa longtemps avant que ne puisse la revoir.


"Il n'en est pas question. Tous les novices resteront au Sanctuaire pour le protéger. Je ne peux me séparer d'aucun guerrier."

Athéna était en pleine discussion avec des chevaliers d'or lorsque je présentais ma requête. Elle préparait le déroulement de la bataille, et n'avait pas le temps de se préoccuper de mes problèmes. J'aurais dû choisir un autre moment, mais Athéna était toujours aussi affairée.

"Mais Athéna... Ma femme..."

"Je sais. Tu me l'as déjà dit. Mais je te répète que je ne peux me passer de personne. Elle devra se débrouiller seule. Il n'y a rien à ajouter. Tu peux te retirer."

Je quittais la salle d'audience, empli d'amertume. Je ne pouvais rien faire. Personne n'irait aider Huang. Personne n'irait la prévenir. Je ne pouvais quitter le Sanctuaire sans être déclaré traître à la cause et exécuté. Je devais attendre la fin de la guerre.

L'attente dura près de trois semaines. Je crus devenir fou. Je tournais en rond, comme un tigre en cage - c'était le cas de le dire - et Shion tentait de me réconforter. Heureusement pour moi, il me donna la force de tenir. C'était un être bon, et sage.

Puis vint le moment. La Guerre Sainte commença. Comme toutes les guerres entre chevaliers, elle fut brève et sanglante. Les guerriers étaient si puissants que les combats étaient très courts, le premier coup étant souvent mortel. Le petit nombre de chevaliers rendait encore plus rapide la durée des batailles. Nous ne fûmes bientôt plus qu'une poignée. J'ai tué tant d'ennemis ce jour-là. Je voulais achever cette bataille le plus vite possible, pour retourner en Chine.

Enfin, Athéna parvint à se défaire de Hypnos et Thanatos, les exécutants de Hadès. Elle enferma leurs esprits dans une boîte, puis les âmes des 108 spectres furent scellées dans un tertre, et les sceaux d'Athéna fermèrent ces prisons pour des décennies. La bataille était finie.

Sur les 79 chevaliers partis du Sanctuaire, seuls cinq d'entre nous revinrent avec Athéna. Shion et moi étions les seuls chevaliers d'or survivants.


Athéna nous convoqua, Shion et moi, dans la Salle du Trône, après la bataille.

"Shion, Dohko, vous avez bien travaillé. Je suis fière de vous. Surtout de toi, Shion. Tu t'es vaillamment battu. Mais j'ai encore besoin de vous pour d'autres tâches."

Je serrais les dents. Je devais parler à Athéna, lui dire que je devais rentrer en Chine.

"Shion, je te nomme Grand Pope. Tu dirigeras le Sanctuaire après ma mort, jusqu'à ma prochaine réincarnation, qui viendra juste avant la prochaine guerre sainte, dans près de 250 ans. Dès maintenant, tu ne vieilliras plus. Mais pour que les hommes ne puissent voir ton visage qui ne changera jamais, tu devras porter un masque."

Je regardais Shion. Il venait de se voir offrir l'immortalité. Je compris que ce cadeau était aussi un lourd destin à supporter. Une vie de solitude lui était promise. Si cela avait été moi, je n'aurais jamais revu la Chine.

Athéna se tourna vers moi, et sourit.

"Dohko, je vais te confier une mission importante. Les esprits des spectres sont encore actifs. Tu devras les surveiller. Je t'ordonne donc de te rendre aux Cinq Pics et d'y passer le restant de ta vie, à veiller de loin sur le Sceau d'Athéna."

Mon coeur fit un bond dans ma poitrine. Athéna me renvoyait chez moi !!
 
 

Je rentrais enfin en Chine, et pénétrais en courant dans la cabane.

"Huang ! Je suis de retour !"

Il n'y eut aucune réponse. Huang avait disparu.


Il me fallut près de six mois pour la retrouver. Son père était venu la chercher pendant mon absence, et elle n'avait pu fuir, son état le lui interdisant. En fait, son père nous faisait espionner régulièrement et attendait le moment propice pour venir reprendre sa fille. L'occasion s'était présentée, et il avait engagé des soudards pour transporter sa fille. Ils n'étaient pas rentrés au village mais avaient déménagé dans une autre région. Le hasard fit que je les retrouvais rapidement.

Huang avait accouché pendant le voyage, mais son père avait revendu l'enfant - une fille, que Huang avait nommée Shunrei - à un quelconque couple. Huang ne savait pas à qui, ni dans quel village. J'ai passé des semaines entières à la rechercher mais jamais je n'ai pu retrouver mon enfant. Elle a sans doute grandi, heureuse, dans la famille qui l'avait achetée. C'est ce que j'ai toujours pensé, afin de calmer ma détresse.

Quand je retrouvais Huang, son père n'essaya même pas de m'empêcher de la reprendre. J'étais si furieux qu'il prit peur en me voyant, et n'osa rien dire. Je pris Huang, affaiblie par le chagrin, et un pénible voyage ainsi que des soins inappropriés, dans mes bras et menaçais l'homme.

"Si je vous revois un jour aux Cinq pics, ou si ma femme disparaît à nouveau, je vous trouverais, et vous tuerais sans pitié."

Je ne revis jamais cet homme.
 
 

Je rentrais aux Cinq Pics avec Huang. Elle était vraiment très faible. Elle avait peu mangé depuis des mois, et son état m'inspira beaucoup d'inquiétude. Je m'occupais d'elle pendant des mois, partant à la recherche de ma fille quand Huang dormait, profitant de chaque seconde de mon temps pour tenter de reconstruire ce bonheur qui m'avait échappé.

Un jour, Huang put à nouveau se lever, et je l'aidais à marcher, afin qu'elle redonne force à ses jambes. Chaque jour elle faisait des progrès, et j'étais fier de la voir si courageuse.

Je la laissais un jour endormie, et partis à la recherche de notre enfant. Comme toujours, je revins bredouille. En entrant dans sa chambre, je découvris que Huang était morte dans son sommeil. Je ne sus jamais pourquoi son coeur avait cessé de battre.


J'ai enterré Huang près des Cinq Pics, dans un coin de la forêt connu de moi seul. Je me retirais souvent sur sa tombe et pleurais pendant des heures. J'avais perdu toute envie de retrouver ma fille. Qu'aurais-je fait, seul, avec cet enfant ? Mieux valait qu'elle ait une famille.

Je maudissais les dieux qui s'entre-déchiraient, provoquant des guerres au cours desquelles des hommes perdaient la vie, ou dans mon cas, leur famille. J'étais amer.

Une nuit, une voix résonna dans ma tête. Plusieurs voix en fait. Les dieux, dans leur cynisme, me parlaient.

"Chevalier d'or, Athéna t'a confié une mission. Tu dois l'accomplir. Tu as maudit les dieux, mais les dieux t'aideront à accomplir ta tâche. Nous t'offrons le Misopeta-Menos, le don de longue vie. Tu vieilliras normalement, mais ne mourras jamais de grand âge. Le jour où ta tâche sera terminée, tu retrouveras ton apparence d'aujourd'hui, et seras délivré du Misopeta-Menos. Ainsi est la volonté des Dieux."
 
 

Je restais donc aux Cinq Pics, et n'en partis plus jamais. J'y suis resté près de 250 ans, veillant sur le tertre loin à l'est. Vers l'âge de 120 ans, mon corps s'était tassé, ma peau avait pris l'apparence d'un vieux parchemin. Mais mon cosmos brillait toujours. J'accomplissais mon devoir envers Athéna. Je restais prisonnier de cet endroit où j'avais tout perdu.

Je recueillis un jour une petite fille, qui ressemblait tant à Huang. Je la nommais Shunrei, comme la fille que j'avais eu il y avait déjà 230 ans et entrepris son éducation. Peut-être était-elle une descendante de ma propre enfant. Un jour un jeune garçon vint pour devenir chevalier. C'était Shiryu. Puis la guerre contre Hadès survint.

Le Sceau se rompit, les Spectres se libérèrent. Ma tache était terminée. Je me libérais du Misopeta-Menos au Sanctuaire, pour affronter mon ami Shion, passé au service d'Hadès. Mais Shion jouait en fait double jeu, et il aida Shiryu. Je n'eus pas à tuer mon ami. Ce supplice au moins me fut épargné.

C'est maintenant que je dois affronter mon destin. La guerre touche à sa fin, et ma vie aussi. La vague d'énergie est sur moi. Je peux sentir sa force, faite d'antimatière, et d'anti-cosmos. Mon corps se désagrège, mais mon esprit vit encore. Je sais que cette explosion va m'anéantir, complètement. Mon corps, mon âme, mon esprit, mes souvenirs, tout va disparaître. Il ne restera rien de moi, hormis une trace dans l'histoire et les souvenirs dans la mémoire de ceux que j'ai connus.

Je vais rejoindre Huang.


Quand Shiryu entra dans la pièce avec Hyoga, il trouva Seiya et Shun à genoux, pleurant devant les armures d'or, vides. Shiryu comprit. Les chevaliers d'or s'étaient sacrifiés afin que lui et ses compagnons puissent atteindre l'Elysée. Ils étaient les seuls à pouvoir le faire, car leurs armures avaient été régénérées par le sang d'Athéna.

Seiya, Shun et Hyoga passèrent le mur. Shiryu resta en arrière, ayant senti la présence de trois spectres, qu'il devait affronter, seul. Il livrerait ce dernier combat à un contre trois sous le regard de l'armure de la Balance, l'armure de son maître, Dohko.

"Adieu, Roshi" pensa Shiryu "Puisse ton cosmos me guider dans ce combat."


Je vis.

Mon nom est Dohko. Ainsi m'ont nommé mes parents, Shiryu et Shunrei. Je ne sais pas encore parler, ces quelques mots ne sont que l'expression de mes sensations.

Les Dieux ne sont pas cruels. Je revis aujourd'hui, réincarné dans un petit enfant. Les dieux ont dû juger que 261 ans à leur service étaient suffisant pour m'autoriser à revenir.

Je ne suis encore qu'un bébé. Mais je sais déjà que quelque part, en Chine, bientôt, naîtra une petite fille. Elle sera nommée Huang par des parents pris d'une divine inspiration. Je grandirai, deviendrai chevalier, et un jour, je la rencontrerai.

Ce jour-là, aucune guerre ne pourra nous séparer.


Fin de "Dohko"
Prochain chapitre : "Kiki"